A l’occasion de la Journée Mondiale de la Femme : L’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Casablanca rend hommage à Chaïbia

 

Dans le cadre de ses activités culturelles célébrant la journée mondiale de la Femme, l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Casablanca organise sous l’égide de la Commune de Casablanca la deuxième édition de « 8Mars » en hommage à la légende vivante de l’art au Maroc et à l’étranger : Chaïbia. La cérémonie d’ouverture a été marquée par la présence effective de Mr Abdelmalek Lakehayli , vice-président de la commune de Casablanca, Mme Rabha Zahid, chef de la Division de la Culture, du Sport et de l’Animation à la Commune de Casablanca et l’artiste de renom Houcine Tallal, fils de feue Chaïbia , ainsi que d’autres responsables concernés et acteurs socioculturels. L’évènement a été ponctué par le programme suivant : vernissage de l’exposition et remise des prix aux lauréats du concours organisé par le BDE de l’ESBAC , variétés mélodiques par le grand chanteur syrien Badr Rami, hommage à des talents au féminin : l’artiste peintre Malika Agueznay, Rabia Aroussi , commissaire des expositions et directrice de la galerie Alif Ba, et l’archéologue Rabha Zahid. Cette édition a été ponctué également par un atelier des arts plastiques animé par les étudiants du Département « Art/Espace » , présentation du film « Chaïbia, la paysanne des arts » par le critique de cinéma HassanNarrais en présence de son réalisateur Youssef Britel, conférence sur le parcours de Chaïbia animé par le critique d’art Jamal Boushaba , signature de la monographie « Chaïbia : mythe vivant » élaborée par Dr. Abdellah et soutenue par le Ministère de la Culture au titre de l’année 2015.
« Nous sommes fiers de rendre un véritable hommage à Chaibia qui demeure une mémoire collective vivante et un précieux patrimoine immatériel. A ce titre , nous tenons à remercier vivement son fils l’artiste de renom Hossein Tallal qui a initié avec le conseil des étudiants une exposition commémorative digne d’un véritable musée montrant pour la première fois aux passionnés d’art quelques facettes représentatives de la vie artistique de Chaibia à l’échelle mondiale : Affiches historiques , écrits de référence, l’image de la fresque de Chaïbia à Asilah , ses photos avec les grandes personnalités politiques et artistiques ( le président Jacques Chirac, le ministre Jack Lang, le grand sculpteur César, le célèbre peintre Zao Wou-ki, le grand compositeur égyptien Baligh Hamdi et bien d’autres encore ) .Nous tenons donc à rendre ce singulier hommage à celle qui, légende vivante de l’art marocain, fait vibrer le cœur des marocains et celui des amoureux de l’art dans le monde entier. Cette initiative n’aurait pu avoir lieu sans le précieux concours et la mise à disposition des archives historiques de Monsieur Hossein Tallal et de Madame Rabia Aroussi de la galerie Alif-Ba. », écrivait Said Guihia, directeur de l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Casablanca.
Dans un esprit scénographique muséal, l’exposition qui se déroulera jusqu’au 31 mars courant donne également à voir de nombreux panneaux – témoignages illustrant quelques facettes saillantes du parcours international de la grande peintre Chaïbia, décédée en 2004. Impossible de parler de l’histoire de la peinture au Maroc sans citer son nom. Source de fierté du Royaume et symbole d’une expression picturale éternellement authentique, Chaïbia est une école de peinture en soi. Sans conteste, elle demeure parmi les artiste-peintres les plus célèbres de tous les temps au Maroc. Aujourd’hui, l’on parle encore de sa peinture, de cette école et ses rudiments, de son univers et ses composantes.
Composée de documents d’appui portant sur le parcours de Chaïbia, son authenticité et ses caractéristiques esthétiques et patrimoniales, l’exposition est une occasion de découvrir ou redécouvrir sa palette riche, sa touche incisive et sa portée tout à fait poétique. Une exposition dédiée à sa mémoire tatouée. Un hommage à une femme artiste de géni :

« J’aimerai bien à saluer chaleureusement de l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Casablanca d’avoir rendu un hommage symbolique à ma mère, en consacrant cette nouvelle édition à son nom . C’est une louable initiative de commémoration et un signe de reconnaissance à l’égard de son calibre mondial riche à plus d’un titre. », nous a confié Houcine Tallal.

Chaïbia consacrée par le magazine égyptien de renom « Sabah El Khir»

Dans son numéro 3276, le magazine égyptien de renom « Sabah El Khir  » a consacré un spécial exclusif élaboré par l’écrivaine et journaliste Imane Outhmane sous le thème  » le Maroc est un don divin » : un spécial de référence qui porte sur les figures de proue de l’art et de la culture du pays en l’occurrence la grande artiste peintre Chaïbia Tallal et la sociologue Fatima Mernissi, icônes du féminisme marocain qui ont consacré leur vie à défendre la place des femmes musulmanes dans le monde et dans leur pays.

L’écrivaine et journaliste Imane Outhmane a publié un article qui s’intitule  » Chaïbia… âme libre qui vole avec la musique des couleurs  » qui retrace le parcours international de Chaïbia Tallal, décédée en 2004, source de fierté du Royaume, symbole d’une expression picturale éternellement jeune et une école de peinture en soi, dont voici sa traduction intégrale:

La leader, la femme , l’humaine, l’artiste inspirée qui a peint au rythme d’une petite fille et ses premiers rudiments. Elle a eu l’honneur d’avoir commencé, sans ni supervision d’un maître, des tentatives d’embrasser l’art, son chemin vers l’art. Ses tableaux ont côtoyé ceux de Picasso et des grands artistes de l’Histoire et se sont invités aux musées les plus prestigieux et les collections privées des princes et rois.

Chaïbia Tallal, artiste marocaine, née en 1929 à Chtouka au Maroc, a grandi orpheline de père, pauvre et n’a pas fait les bancs de l’école. Elle s’est mariée à l’âge de 13 ans. Mais son mariage n’a pas duré longtemps puisque son mari est décédé un an après la naissance de son premier et unique fils. Ainsi elle entame une nouvelle phase de sa vie de veuve et de maman alors qu’elle n’avait que 15 ans. Une jeune belle femme, seule et pauvre, face à la merci du monde qu’elle affrontait les yeux contemplatifs, le cœur plein d’espoir et d’intenses sentiments esthétiques.
Elle commence alors à travailler dans le fil de laine et dans le domaine des travaux domestiques pour subvenir aux besoins de son fils et son éducation jusqu’à l’âge de 30 ans. Son talent déborde et elle ne pouvait plus le laisser cacher en elle. Peut-être qu’un coup de chance a boosté ses travaux et son rêve. Mais ce qu’on ne peut jamais nier c’est bien sa volonté et sa personnalité unique, puisqu’elle a refusé catégoriquement de se remarier malgré les mille et une propositions et a consacré toute sa vie à son travail et à l’éducation de son fils Houcine Tallal. Elle a ainsi choisi la liberté et l’art, l’expérimentation et le dur labeur.
Elle a commencé à peindre pour répondre à l’appel qui lui est venue dans un rêve qu’elle a faite. Celui de prendre le pinceau et les toiles et de peindre. Elle a souvent rêvé de plusieurs voiles tournant autour d’elle dans un espace esthétique et des gens qui lui venaient de partout pour célébrer ses travaux et lui donner des papiers et des couleurs.
Un jour, dans le sanctuaire de Bouchaîb au cœur du village de Chtouka, Chaïbia a fait la rencontre d’un Saint qui lui a dit qu’elle allait être la Bénédiction et le Don de cette région. Et elle est devenue le Don divin de tout le Maroc.
Elle est, sans conteste, la plus célèbre artiste peintre qu’a connue le Maroc. Ses toiles ont remporté un franc succès mondial et elle a exposé dans les grandes capitales du monde. Par hasard, elle a rencontré le critique d’art français Pierre Gaudibert qui n’a pas hésité à l’aider à percer encore plus dans le monde de l’art comme il était subjugué par ses qualités artistiques. Sa première exposition a eu lieu en 1966 à Casablanca. La même année, elle a exposé ses œuvres à Paris. C’est un coup de chance inouï !
Peut-être que c’est la chance aussi qui a fait qu’il y a eu cet entrelacs entre son style de peinture spontanée et brut avec la nouvelle école qui appelait à rejeter les règles classiques de l’art et les académismes. Chaîbia a rehaussé l’univers de l’art brut surtout le mouvement européen Cobra. Chaîbia était passionnée de la nature, des fleuves, de la pluie et des fleurs et elle a captivé les cœurs de grands penseurs et artistes par sa fierté et l’authenticité de ce qu’elle exprimait dans ses tableaux.
Sa maison qui porte son nom écrit sur une bannière dorée, numéro « 13 ». C’est une bannière connue de tous à l’époque, puisque la porte de sa maison était ouverte pour tous les visiteurs de tout le Maroc de diverses sensibilités culturelles, politiques, religieuses et intellectuelles, tel un forum culturel et un une destination artistique portant les facettes de la Terre, du lieu et du temps dans le Maghreb Arabe.
L’un de ses proches raconte qu’elle était emportée par le soufisme et elle ne connaissait qu’Allah. Dès qu’elle se levait chaque matin, faisait sa prière et allait à sa galerie. Elle était passionnée de musique aussi ; Elle était une grande amie du grand compositeur égyptien Baligh Hamdi qui lui rendait visite à chaque fois qu’il se rendait au Maroc. Chaïbia était surnommée la légende de l’époque, « les pieds sur terre et la tête au ciel». Dans ses toiles, elle a célébré les couleurs de son pays et sa somptueuse nature et a exprimé la beauté telle qu’elle la voyait.
Dans ses derniers jours, elle a vaincu l’analphabétisme dont elle souffrait depuis toujours. Elle a appris à lire et à écrire et a composé oralement des poèmes. En outre, elle a glané plusieurs prix internationaux et a eu un nombre incalculable d’hommages dans les quatre coins du monde. Parmi ces consécration, on retient notamment un Doctorat honorifique des beaux-arts « the Cultural Doctorate in Fine Arts » (World University Press), une adhésion comme députée au Parlement Mondial de la Sûreté et de la Paix avec un passeport diplomatique délivré par le conseil mondial de la paix et de la sécurité.

La brutalité de la couleur et de la formation

Chaïbia racontait et transposait le monde dans ses toiles tel qu’elle le voyait, dans un style à mi-chemin entre l’expressionnisme et l’abstrait ou comme aime à l’appeler les critiques le brut. Et ce à partir de la couleur, sa clarté, son purisme et ses diverses compositions. Elle s’est créée un univers esthétique unique et artistique propre. Elle a profondément choisi la simplicité, regardant le blanc rayonnant qu’elle affrontait sur la toile et peut-être même dans la vie, avec peur et solitude. Deux sentiments qu’elle a vaincus échangeant d’imaginations entre elle et cet univers.
Après avoir fondé une école artistique propre à elle, étant parmi les pionniers du mouvement de modernisme qui ont mis les bases de l’art, Chaïbia a créé la Galerie Alif Ba, un centre culturel qui participe à ancrer les notions de l’ouverture sur les grands plasticiens mondiaux.
A cause de sa maladie, elle n’a pas pu assister à sa dernière exposition et elle a rendu l’âme en 2004, laissant derrière elle un legs de compositions et de couleurs qui racontent un esprit libre ; celui d’une femme d’exception qui a lutté contre l’analphabétisme et la pauvreté, qui a aimé la lumière et l’art et vivre son talent et l’expérimentation…Elle est un exemple rare du développement humain et du mérite de la connaissance.
Pour cela, son voyage dans la vie est une référence pour le défi et le militantisme, de la tentative perpétuelle et la réalisation de son espoir. Ce qu’elle a réalisé fait d’elle un symbole artistique et humain, qui dépasse largement le fait qu’elle soit une Marocaine et qui est arrivé jusqu’aux grands artistes mondiaux. Elle figure dans Encyclopedia of the Mideast and North Africa » (volume 4) par Indiana University Press et dans Oxford University Press (New York): « Dictionary of African Biography » par Osire Glasier( History Department) et dans le Dictionnaire Larousse de l’art dans le monde.
Chaïbia a enrichi son pays, son époque et l’histoire de l’art et a fondé l’histoire d’une gloire sans précédent avec la technique de l’enfance !

Khalil Rais et Cheikh Abdellah

 

 

 

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